Quand la carrosserie devient orfèvrerie

Lorsque l’on passe devant la carrosserie Mauduit, à Ligueil, on ne peut pas imaginer les trésors qui se cachent derrière les murs. Depuis près de 20 ans, Stéphane Mauduit y restaure avec passion de nombreux véhicules. Motos, matériel agricole, voitures récentes… mais ce qui fait vibrer le carrossier ce sont les automobiles de collection. Visite dans un garage aux allures de musée. 

Passionné, Stéphane Mauduit l’est sans aucun doute. L’homme est même totalement habité par ce qui est devenu son métier : la carrosserie. « Ce que je préfère, ce sont les voitures anciennes, les véhicules de collection ». Depuis 20 ans, à Ligueil, la Carosserie Mauduit, répare des Bugatti, Ferrari, Jaguar, Austin Healey ou AC Bristol… Tout ce que l’industrie de l’automobile compte de plus beau et de plus prestigieux.

Stéphane découvre le métier à 17 ans. Il commence comme apprenti dans un petit garage de la région avant de se mettre à son compte quelques années plus tard, à tout juste 25 ans. Stéphane sollicite alors la mairie de Ligueil qui accepte de l’accompagner en lui octroyant un crédit bail. Ce soutien permet la construction d’un bâtiment de 300 m² au sein de la zone artisanale la Bonne Dame. Nous sommes en 1997. Stéphane commence seul, prend un apprenti l’année suivante puis embauche un ouvrier. Aujourd’hui, l’entreprise compte 8 personnes.

Une voiture rare peut demander jusqu’à 3 ans de travail

En plus des voitures de collection, les carrossiers et peintres de l’établissement prennent en charge les véhicules pour le compte d’une quinzaine de garages aux alentours, 700 au total chaque année. Des voitures mais aussi des motos ou des machines agricoles. Généralement, les travaux ne dépassent pas quelques dizaines d’heures. Sur les modèles récents qui constituent 90 % de l’activité de l’entreprise, il s’agit souvent de remplacer des éléments "en utilisant de nouvelles technologies comme le collage qui permet d’assembler différents matériaux comme l'acier, l'alu ou le plastique..." En revanche, quand une « vieille dame » passe les portes du garage Mauduit, c’est généralement pour un long séjour. Jusqu’à 3 ans en fonction des travaux à effectuer et surtout des pièces à trouver. « Sur un modèle ancien, on peut passer 100 heures sur une aile, près de 1 000 heures en tout ». L’équipe travaille ainsi actuellement depuis deux ans sur la restauration d’une Austin Healey 100 M qui a été confiée à l’artisan par un collectionneur belge. Stéphane Mauduit est en effet un spécialiste reconnu de la marque. Il possède d’ailleurs un exemplaire de cette voiture d’exception. Caractérisée par leur volant gigantesque, leurs roues à rayons et leur peinture bi-ton, les « Big Healeys » - surnom qu’elles doivent à leur gros moteur de 3 litres de cylindrée - sont des voitures de sport créées dans les années 1950 et 1960. Elles sont aujourd’hui extrêmement recherchées et s’échangent généralement aux alentours de 60 000 euros. Mais aux enchères, les prix peuvent s’envoler. Un modèle impliqué dans le tristement célèbre accident des 24 heures du Mans en 1955 a frôlé le million d’euros dans une vente anglaise en 2011.

Des propriétaires perfectionnistes et exigeants

Pour accueillir ses pensionnaires, Stéphane Mauduit dispose aujourd’hui de 600m². On y trouve des Austin Healey bien sûr mais aussi d’autres trésors comme cette Jaguar type E. En cours de restauration, elle a été achetée aux Etats-Unis "mais n’a pas reçu le traitement qu’elle mérite : elle possède un moteur V8 jamais installé sur une type E et certains éléments du châssis ont été découpés". Il va donc falloir la « reprendre » intégralement pour lui donner une nouvelle vie avec toute la rigueur qui caractérise le carrossier. « Je suis perfectionniste et assez maniaque » s’amuse le professionnel.
Il y a quelques années, l’équipe est intervenue sur un modèle encore plus rare : une Bugatti de 1957. Propriété d’un milliardaire américain, le véhicule a été refait à neuf à Ligueil. Elle a ensuite participé au très célèbre et très sélect concours d’élégance automobile de Pebble Beach organisé chaque année en Californie. Certains riches passionnés n’hésitent pas à dépenser plusieurs dizaines de milliers d’euros dans une restauration, "quitte à racheter une voiture de collection pour ne récupérer que les vis..."

STA-01/09/2016